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Mon année sabbatique

J'ai décidé de prendre une pause.

 

Ma vie n'a pas toujours ressemblé aux apparences. Certains sourires sur les réseaux sociaux cachent de la tristesse, d'autres de la détresse. Tu peux facilement donner l'illusion du bonheur en dansant sous la pluie. En revanche, le cœur ne fait pas semblant. Il s'écorche, saigne, et cicatrise au rythme des étapes du deuil.

Parfois, tu traverses l'orage guidé par cette petite lueur au fond du tunnel, ce qu'on appelle l'espoir ; d'autres fois tu dois apprendre à te déplacer seule dans le noir.

J'ai passé presque quinze ans à errer entre ces murs à la recherche de lumière. Jusqu'à ce qu'une question s'impose : celle de la vie ou de la mort.

 

Septembre 2016. Le fond. Dépression, fausse-couche, hémorragie, septicémie, mon corps me lâche peu à peu. J'ai passé trop de temps à espérer m'endormir sans jamais plus me réveiller. Et sans surprise, chaque année me rapproche dangereusement du point de non retour.

Et puis arrive un jour, ce jour, le regard de ton fils... et tu décides d'agir pour que ça change.

 

Si tu dois mourir, meurs maintenant. Mais si tu dois vivre, vis vraiment.

 

Novembre 2016. Dans la foulée, je quitte l'homme avec qui je vis, la maison dans laquelle nous habitons et le CFA pour lequel j'enseigne depuis plusieurs années. Je sais que ma vie va forcément passer par quelques concessions mais je ressens ce besoin vital de changement, d'aspirer à une vie simple, sereine et surtout, plus heureuse.

Terrassée par la fatigue, j'occupe d'abord la plupart de mon temps à dormir, jalousant tous ces petits animaux capables d'hiberner. Les journées se suivent, se ressemblent, se confondent... ceci-dit, elles ont le mérite d'exister.

 

Janvier 2017. Je signe un contrat d'interventions en didactique dans une prépa qui forme les futurs professeurs des écoles. Quelques heures le samedi matin, un poste intéressant, valorisant, mais loin d'être nourricier.

Deux solutions s'offrent alors à moi : trouver un mi-temps en complément ou profiter du chômage. C'est évident, mon corps a plus que jamais besoin d'une pause. Deux, trois calculs plus tard, une conversation avec mon fils et ma décision est prise. Va pour du repos. Je décide désormais d'avancer au jour le jour et de prendre du temps pour moi.

 

Malgré le confort de vie que ce choix m'apporte au quotidien, il n'a pas toujours été facile à justifier. Du coup, je me suis servie de toutes les questions que j'ai entendue plus ou moins directement pour construire la suite de ce texte. Enjoy !

 

 

Et comment tu vas faire pour bouffer ?

 

Préoccupation soudaine et immédiate des personnes à qui j'explique prendre une pause...

Qu'on se le dise, vivre a deux sur un chômage à 3 chiffres n'est pas chose facile, mais c'est loin d'être infaisable. C'est surtout très proche finalement de ce à quoi ça ressemblait avec mon mi-temps au CFA, une fois les frais d'essence et de garderie retirés. Nous n'avons donc pas opérés de réelles changements dans notre mode de vie. Nous vivons simplement, peu de restaus mais des petits plats préparés à la maison avec des légumes et des fruits bio. Peu de cinés mais des journées au lac ou à l'océan, peu de soirées coûteuses en ville mais des sorties au skate park et à vélo.

Et pour les projets plus conséquents, comme le triathlon, j'ai tapé dans mes petites économies.

 

T'as pas des comptes à rendre à Pôle Emploi ?

 

Si, évidemment. D'abord, je me tiens au courant des offres d'emploi dans mon secteur, celui de l'enseignement. Mais mon cursus recherche ne me permet pas d'être prioritaire sur les remplacements.

Ensuite, j'ai suivi une formation pour les créateurs d'entreprise. J'avais un projet en tête et même si je savais qu'il n'était pas réalisable aujourd'hui faute d'apport conséquent, je me suis dit que c'était l'occasion de voir comment il pourrait être perçu. J'ai donc passé 6 mois à m'investir sur la création d'une école alternative pour les élèves de primaire des filières de haut niveau. Le but étant de permettre aux enfants qui s'entraînent tous les soirs de concilier l'école, le sport et leur vie de famille.

J'ai rencontré plein de monde grâce à ce projet, des parents, des entraîneurs, des directeurs, des politiques,... et tous m'ont beaucoup apportés, ceux qui m'ont soutenus comme ceux qui m'ont mis des bâtons dans les roues. J'en ressors murie.

Aujourd'hui, je travaille sur ma réinsertion professionnelle. Je réfléchis à ce que j'ai envie de faire pour la rentrée prochaine.

 

Mais tu t'ennuies pas ?

 

En toute honnêteté, je n'en ai pas encore eu le temps. Quel kiffe de se lever tous les matins pour faire ce que tu as envie de faire, ce que tu n'aurais jamais eu le temps de faire...

Au début, j'ai surtout dormi. Je n'ai pas forcé les choses, j'ai essayé d'écouter mon corps et de commencer à en prendre soin. De toute façon, je n'avais aucun compte à rendre, si ce n'est d'être à l'heure à l'école !

Au fur et à mesure, j'ai retrouvé des forces et l'envie de sortir un peu plus, d'aller à la plage, surfer, bricoler, passer du temps avec des potes. J'ai fini par reprendre le sport aussi. Gym Direct, Sissy MUA, Aqualigne,... puis le triathlon. En quelques mois, mon corps s'est redessiné, m'apportant la confiance dont j'avais besoin pour avancer.

 

C'est à ce moment-là que l'aventure Instagram démarre. Elize Dulam née. Une jeune femme dont je contrôle totalement l'image, épanouie, heureuse, souriante et pleine d'assurance. La femme de mes rêves, celle à qui j'ai envie de coller même quand tout va mal. Au fil du temps, je choisis de laisser transparaitre quelques unes de mes faiblesses, mes doutes, mes peines, parce que j'ai envie d'être plus authentique. Après tout, pour le meilleur et pour le pire, non ?

 

C'est quoi cette nouvelle lubie pour le triathlon ?

 

Entre Gym direct et l'Ironman, le saut peut paraitre impressionnant, je vous l'accorde ! En fait, tout part d'IG et des belles rencontres qu'il en découle à l'été 2017.

À cette période, je passe pas mal de temps sur les réseaux sociaux. J'aime m'occuper à suivre le quotidien des blogueuses, des fitgirls et des sportifs de haut niveau. Mais surtout, je m'intéresse de près à la préparation d'un pote triathlète à l'Ironman de Vichy, un format de compétition complètement démesuré que je découvre à ce moment-là. Nous échangeons plusieurs semaines sur nos passés sportifs et la place que pourrait prendre le sport à l'avenir dans nos vies. Jusqu'à LA question. Mais pourquoi pas toi ?

La réponse me paraissait tellement évidente... Mais pour la première fois depuis une éternité, quelqu'un semblait croire en mes capacités physiques, en mon mental et en mon investissement. Alors à cet instant, j'ai eu envie d'y croire aussi.

La suite vous la connaissez, une paire de pompes, un vélo, un maillot de bain plus tard et c'était parti pour l'aventure de ma vie. D'ailleurs si ça vous intéresse, je partagerai toute ma préparation avec vous dans un prochain article.

 

Et ta pause, ça va durer encore longtemps ?

 

Officiellement, je ne travaille plus depuis février 2017. Enfin juste quelques heures en prépa par-ci par-là pour garder un pied dans le monde du travail. Au départ, je pensais reprendre en septembre. Mais je n'ai rien trouvé d'intéressant. Alors j'ai décidé de prendre mon dossard pour Aix et de prolonger ma pause jusqu'à la fin de la compétition. D'autant plus que c'est le genre d'opportunités qui n'arrive pas deux fois dans une vie.

En même temps, j'ai rencontré quelqu'un. Ce type qui vous transperce le cœur au premier regard, qui vous fout des papillons dans le ventre et qu'on n'a pas envie de laisser passer. Alors je m'y suis investie corps et âme. Une relation à distance dans laquelle j'ai laissé beaucoup de temps et d'énergie, pour laquelle je me suis battue pour que ça fonctionne.

En réalité, j'aurai dû reprendre ces prochaines semaines. Mais ça n'arrivera pas... J'ai besoin d'un dernier été de liberté, un été sportif aux côtés des gens que j'aime.

 

Un an et demi.

Pour certains, je me suis isolée en trouvant refuge à l’abri du monde réel. C'est vrai. Pour d'autres, j'ai honteusement profité du système.

En réalité, j'ai simplement pris le temps de vivre, pour moi. Le temps de me reconstruire, de retrouver une identité, et de reprendre gout aux plaisirs les plus simples...

Le chant des grillons dans les dunes du Porge, la violence des vagues qui déferlent, la chaleur du soleil sur ma peau, le goût du sel sur celle de l'homme que j'aime, l'odeur enivrante du monoï ; le plaisir d'un sourire, le regard d'un enfant.

 

Elize.

 

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